lundi 12 août 2013

Doit-on interdire la pornographie pour faire baisser les viols ?

Le débat est bouillant entre les différents acteurs qui cherchent le remède à ce mal endémique du viol - et il ne fait que s'échauffer ces jours-ci, alors que certains ont fait sortir un nouvel accusé de leur boite à antidotes : la pornographie. 

®Getty Images
Un avocat a en effet déposé un recours auprès de la Cour Suprême demandant l'interdiction totale de la pornographie et la criminalisation de son visionnage. Il est déjà interdit en Inde de diffuser ou de vendre tout matériel pornographique, mais le "consommer" de manière privée est toléré. Personne, en tout cas selon la loi, ne peut être condamné pour avoir regardé un film pornographique chez lui. 

C'est cela que cet avocat aimerait changer. Dans sa pétition, particulièrement mal écrite et maladroite, il affirme que les films pour adultes sont à l'origine des divorces, pervertissent la culture indienne et surtout, qu'ils sont responsables de beaucoup de viols, car "les criminels sexuels regardent ces clips avant d'attaquer des femmes". Ces affirmations, reprenant des clichés conservateurs très répandus dans le pays, ne se basent sur aucune étude scientifique précise. Et c'est bien cela qui fait peur, car la Cour Suprême a tout de même accepté d'étudier les mérites de cette pétition. 

Ce débat mérite pourtant la plus grande des nuances. D'un côté, il est évident qu'aujourd'hui, grâce à Internet - à travers les sites hébergés à l'étranger - et surtout aux smartphones indiens bon marché, la pornographie est de plus en plus accessible et mobile.  
Cependant, comme l'explique une sociologue qui a mené plusieurs études sur la sexualité des Indiens, il n'y a aucune recherche dans le monde qui prouve que la consommation de matériel pornographique entraine de manière directe la commission d'un viol. Certaines études montrent même, à l'inverse, que l'élargissement de l'accès à ces films aux Etats-Unis a été accompagné de la baisse des violences sexuelles. 

Pour essayer de percevoir le lien que l'on pouvait faire entre ces deux phénomènes, je me suis moi-même rendu sur un de ces marchés qui vend des films pornographiques pour téléphones portables par gigabits. Et d'essayer de voir si cela peut vraiment être dangereux pour les femmes indiennes 

Voici ce reportage





jeudi 8 août 2013

L'Inde, un géant à bout de souffle


®François Lenoir - Reuters
L'Inde connaît depuis plus d'un an un ralentissement économique inquiétant, avec une croissance tombée au plus bas depuis dix ans. La troisième économie asiatique souffre maintenant d'une autre hémorragie ; les investisseurs étrangers commencent à quitter le navire. Déçues par le potentiel de croissance indien, mais aussi par les lourdeurs administratives et la corruption, certaines grandes compagnies étrangères sont revenues de leur rêve indien.

L'entreprise la plus récente à annoncer son retrait est bien connue dans l'Hexagone : il s'agit d'ArcelorMittal. Le leader mondial de la sidérurgie vient en effet de jeter l'éponge. ArcelorMittal, contrôlé pourtant par l'Indien Lakshmi Mittal, cherchait depuis 2006 à ouvrir sa première aciérie dans le pays. Il prévoyait d'investir en tout 9 milliards d'euros, l'un des plus importants investissements étrangers des dernières années en Inde.
Le groupe avait déjà signé plusieurs contrats avec les autorités locales, mais il a été découragé par les délais extrêmement longs pour obtenir les terrains nécessaires et les droits d'exploitation du minerai. ArcelorMittal affirme poursuivre ses efforts pour ouvrir une première usine dans deux autres Etats indiens, le Karnataka et le Jharkhand. 
Ce cas est loin d'être isolé : la même semaine, un autre projet de sidérurgie engagé par le coréen Posco, a aussi été annulé, pour des problèmes similaires.

Mais d'autres secteurs sont également concernés. On peut citer la banque suisse UBS, l'américaine Morgan Stanley, ou le fabricant d'équipement de télécoms anglais Augere Wiresless. En tout, les investissements directs étrangers en Inde ont chuté de 27 % en un an seulement.
Crise économique et corruption
En cause, il y a bien sûr le ralentissement économique mondial, qui oblige les multinationales à investir avec parcimonie. Le français Peugeot avait par exemple annoncé il y deux ans la construction d'une usine dans le nord de l'Inde, mais a dû suspendre ce projet à cause de ses mauvais résultats en Europe.
Mais il n'empêche. Pendant cette même période, les investissements étrangers en Chine, eux, ont bondi de 20 %. Il y a donc un problème indien, et il est lié à une administration vétuste et corrompue.
L'acquisition de terrain reste le principal problème. La loi qui l'encadre est complètement obsolète, car elle date de l'époque coloniale. A cela, il faut rajouter les nombreux pots-de-vin qu'il faut payer à chaque étape et qui retardent les procédures. La Banque Mondiale a ainsi placé l'Inde au 173e rang mondial, sur 185 pays, dans son classement de la facilité de démarrer une activité dans le monde.
Une réponse législative ?
Une des réponses peut être législative. Le Parlement, en session ces jours-ci, a l'opportunité d'adopter plusieurs lois, qui encadreront plus efficacement l'achat de terrains pour les industries ou qui mettront en place un organe anticorruption pour punir les fonctionnaires en cause.
Mais là encore, le parti du Congrès, à la tête du gouvernement, est en minorité dans les deux chambres et semble trop faible pour cela. Il faudra peut-être donc attendre les élections de l'année prochaine pour voir apparaître un nouvel élan politique et économique.

Chronique publiée sur RFI 

mardi 6 août 2013

Dharavi Rocks, du recyclage à la musique

Ils sont jeunes et légèrement dépenaillés, âgés de 12 à 17 ans pour la plupart et venant du quartier chaotique et surpeuplé de Dharavi. Un monde à part dans Bombay, complètement abandonné par les autorités et qui, du coup, a appris à ces enfants à se débrouiller tout seuls et à créer à partir de ce que les autres ne veulent plus. 
Le groupe, lors d'un concert devant les étudiants
d'une grande école de commerce de Bombay
Dharavi, ce bidonville de plus de 600 000 habitants, est le centre du recyclage du plastique pour l'énorme mégalopole de Bombay et les enfants des ramasseurs de déchets ont donc mis à profit cette mentalité créatrice, en fondant un groupe de percussions à partir d'objets recyclés. Bidons de peinture en ferraille ou d'huile en plastique, bouteilles de verre, tout matériel, toute forme crée un son différent. Voici l'orchestre de Dharavi Rocks, composé des enfants du recyclage. 

Ce groupe monté il y a deux ans grâce à l'aide précieuse de l'association Acorn et au travail acharné de Abhijit Jejurikar, est en train de tracer sa route inattendue vers le succès : il est appelé pour jouer devant les responsables politiques ou chefs d'entreprise ainsi que certaines stars de Bollywood. Et le 31 juillet dernier, il était sur la plus grande scène de Bombay, le Blue Frog. Plus que de la charité, c'est un hommage à la créativité de ceux qui veulent rêver, aussi, et s'en sortir en musique.

Voici le reportage sur ce groupe incroyable de Dharavi Rocks.